vendredi 22 janvier 2010

La malhonnêteté de Gilles Duceppe sur le contrôle des armes à feu

Est-ce le désespoir, l’ennui d’être dans l’opposition éternelle ou la pure mauvaise volonté qui poussent Gilles Duceppe à duper les citoyens de Laurier-Ste-Marie et de tout le Québec ? Dans un dépliant récemment envoyé aux résidents du comté, le chef du Bloc Québécois affirme sans broncher que Michael Ignatieff et Jack Layton, en laissant à leurs députés respectifs le droit de voter selon leur conscience au sujet du projet de loi conservateurs C-391 sur la réduction de la portée du registre des armes à feu, ont par ce fait décidé « de tourner le dos aux victimes des armes à feu» .

Le dépliant présente un tableau résumant les votes des députés de chaque parti lors de la deuxième lecture du projet de loi. On y voit que les 47 députés du Bloc ont voté contre et que la totalité des 143 députés conservateurs ont quant à eux appuyé le projet de loi. Chez les libéraux, 8 députés sur 72 ont voté pour (soit un peu plus de 10%), alors que 12 députés néo-démocrates sur 36 (soit 33%) ont voté pour également.

Premier signe de malhonnêteté : Gilles Duceppe souligne que tous les députés conservateurs du Québec (10 députés) ont voté pour le projet de loi, mais il n’explique pas que les 14 députés libéraux du Québec ont voté contre ce même projet. M. Duceppe n’a pas le monopole de la vertu au Québec mais semble incapable de l’accepter en reconnaissant la position des députés québécois des autres partis qui ont voté pour le maintien du Registre dans son intégrité.

On peut faire dire toutes sortes de chose aux chiffres. Par exemple, il aurait pu écrire qu’il y a eu plus de 40 % de députés du Parti libéral du Canada qui ont voté contre le projet de loi qu’il n’y a eu de députés du Bloc Québécois (66 vs 47). Il aurait donc pu écrire sans mentir que les 66 députés libéraux ayant voté contre le projet de loi ont eu un impact nettement plus important que ceux du Bloc.

Deuxième signe de malhonnêteté : Gilles Duceppe a complètement passé sous silence le fait qu’il a exigé que les députés du Bloc suive la ligne de leur parti, comme les Conservateurs de Stephen Harper ont fait. Ce fait est important dans la mesure où les résultats ne signifient plus la même chose : en effet, comment auraient agi les députés du Bloc vivant dans les régions s’ils avaient pu voter selon leur conscience ? Affirmer que les chefs des libéraux et des néo-démocrates ont laissé tombé les victimes des armes à feu (même s’ils ont eux-mêmes voté contre le projet et exprimé haut et fort leur opinion personnelle sur la question) parce qu’ils ont laissé leur député voter selon leur conscience est d’une navrante démagogie. Une autre interprétation aurait pu être que les libéraux et les néo-démocrates ont fait confiance à leur député et leur ont donné le pouvoir de représenter leur électorat.

Troisième signe de malhonnêteté : « Conservateurs, Libéral et NPD : Même combat pour l’abolition du registre des armes à feu » : telle est la phrase alarmante qui apparaît bien en gras sur le dépliant, et qui laisse tout d’abord entendre qu’il s’agit d’un combat des libéraux, ce qui est archi-faux, mais qui suppose également que le projet porte sur l’abolition complète du Registre, ce qui n’est pas le cas. Faut-il rappeler que le projet visait à réduire la portée du registre, non à l’abolir ? Gilles Duceppe a choisi de ne pas faire cette précision parce que cela aurait diminué la portée de ses cris d’indignation. La diabolisation à outrance de adversaire semble être une des armes préférées du vertueux Gilles Duceppe.

Quatrième signe de malhonnêteté : dans tous ses publicités, le chef du Bloc se présente comme le grand défenseur des intérêts du Québec et de tous les Québécois. Or, nulle mention de cette qualité dans celui portant le projet de loi C-391. Pourquoi ? Tout simplement parce que plusieurs députés du Québec ont voté pour ce projet de loi, donc en faveur de la réduction de la portée du registre, et il est fort à parier que d’autres députés du Bloc habitant en région, notamment, auraient voté pour s’ils avaient pu voter selon leur conscience. Or, ces députés ne sont pas moins Québécois que les autres. Ainsi, c’est toute la rhétorique bloquiste d’être les défenseurs des intérêts des Québécois qui tombe.

Il est inévitable qu’un parti politique qui a la prétention de défendre et de représenter les valeurs de tout un peuple soit confronté de temps à autre à la dure réalité de la diversité des valeurs au sein de ce même peuple. Il est hautement préférable qu’un parti défende ouvertement des valeurs, préférablement des valeurs progressistes, des valeurs qui transcendent les frontières, des valeurs auxquelles chaque citoyen est libre d’adhérer ou non sans risque de se voir refuser le nom de ‘vrai Québécois’ ou de ‘vrai Canadien’.

Il est de bonne guerre de concevoir des outils de marketing partisans pour décrire les positions de son parti et illustrer les valeurs qu’il défend. Il est par contre de très mauvais goût de le faire en associant ses adversaires à des positions qu’ils ne défendent pas. C’est le Parti libéral du Canada, et non le Bloc Québécois, qui a été à l’origine du Registre des armes à feu et ses députés, soutenus par leur chef, l’appuient toujours dans leur écrasante majorité. En ce sens, le dépliant reçu cette semaine par des milliers de citoyens Québécois ne diffère guère de celui envoyé par les Conservateurs il y a quelques semaines accusant le Parti libéral du Canada d’antisémitisme. Il frôle les limites de l’indécence.

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